Le temps est l’un des éléments essentiels à la musique. Pire, il est même indispensable à toute exécution de la musique. Mais alors, comment est-il représenté en musique ? Quelle est la différence entre la pulsation, le beat et le tempo ? Qu’est-ce qu’un temps lisse ? Comment compter le temps ? Et quel BPM utiliser pour jouer un tempo allegro ? Voilà des questions auxquelles nous allons répondre aujourd’hui…

Cette vidéo est la 4e d’une série d’un petit cours dédié au solfège. Bon visionnage !

Introduction

Comme nous l’avons vu dans la précédente leçon de ce petit cours : la musique est l’art d’entremêler sons et silences. Si ces événements sonores (sons et silences) constituent le contenu de la musique, le temps en est le contenant. Eh oui, aucun événement sonore ne peut par définition exister hors du temps.

On peut dire que le temps gouverne la musique.

Mais saviez-vous qu’il existe des œuvres qui tentent d’échapper à l’emprise du temps…?

Photographie de l'orgue utilisé pour l'oeuvre ASLSP

L’art du temps

Dans une petite église de la ville d’Halberstadt en Allemagne, on peut entendre le souffle d’un orgue chanter en continu depuis près de 20 ans. Ce petit orgue étrange a été construit spécialement pour jouer une et une seule œuvre intitulée “As Slow As Possible” écrite en 1987 par John Cage.

Ci-dessous : changement de ton de l’orgue, le (le changement est à 8min30 de l’enregistrement)

Comme l’indique son titre, cette oeuvre doit être jouée le plus lentement possible. Ainsi pour cette performance, le changement de note le plus récent s’est passé le 5 février 2022 et le prochain changement est pour relativement bientôt : le 5 février 2024.

Plus fou encore, cette incroyable performance débutée en 2001 ne s’achèvera qu’en 2640…

“As Slow As Possible” existe dans ce que Pierre Boulez appelle un temps lisse, c’est-à-dire un temps musical qui n’est pas marqué par un rythme battu facilement perceptible.

De nos jours, plusieurs genres de musique se rassemblent autour de cette conception du temps, parmi lesquelles on peut retrouver :

  • L’ambient ou musique atmosphérique, très utilisée de nos jours dans le jeu vidéo pour habiller et donner vie aux scènes d’exploration ou de contemplation
  • Le dark ambient, un genre de musique à la croisée de l’ambient, de la musique industrielle et de la musique bruitiste
  • Le drone, qui pousse à l’extrême en suprimant toute sensation de rythme, ne faisant usage que de bourdon
  • Le drone doom, mélange de drone et de doom metal, bien plus sombre que le drone.
  • La space music ou musique planante, un sous-genre de la musique new age décrite comme “tranquille, hypnotique et transportante”.
  • Ou encore le lowercase, un genre moins connu, caractérisé par l’usage de sons habituellement inaudibles mais amplifiés à des niveaux extrêmes.

Le temps lisse crée en fait une sensation d’écoulement continu, donnant ainsi de la souplesse aux événements sonores. Ce temps lisse, perçu comme suspendu créer alors chez l’auditeur un sentiment d’éternité.

Par opposition au temps lisse, il existe le temps strié dans lequel une oeuvre évolue avec un rythme marqué. C’est cette conception du temps qui est de nos jours la plus répandue et que l’on retrouve dans l’écrasante majorité des genres de musique :

« Dans le temps lisse, on occupe le temps sans le compter ; dans le temps strié, on compte le temps pour l’occuper. »
Pierre Boulez, compositeur français du XXe siècle

Pour qu’un temps musical soit strié, il doit nécessairement être gradué. Cette graduation s’appelle…

La pulsation (battement)

La pulsation consiste en la répétition d’un battement qui revient de manière cyclique. Ici, elle est donnée par le métronome, mais elle peut tout à fait provenir de n’importe quel autre objet sonore. Cette pulsation va nous permettre de définir une unité pour mesurer la durée en musique.

Cette unité est sobrement nommée…

Le temps

Nos amis anglophones, quant à eux, appellent cette unité : un beat. Pour éviter de rendre le propos confus, nous utiliserons aujourd’hui ce terme anglophone. Mais gardez bien en mémoire que ce terme reste interchangeable avec celui de temps.

Un nouveau beat naît à chaque nouvelle pulsation, interrompant le beat précédent. Il faut ainsi deux pulsations pour délimiter un beat. De fait, sur notre graduation, une pulsation est un événement ponctuel alors qu’un beat est une période.

Cependant, et à l’instar de la seconde ou la minute, le beat n’est pas une unité étalon. En effet, la durée réelle des beats peut varier d’une musique à l’autre.

Pour un passage musical donné, le compositeur aura fixé la durée exacte des beats au moyen de ce que l’on appelle le tempo.

Le tempo

Le tempo fixe donc une durée aux beats, et procure par la même occasion une vitesse à la pulsation. C’est lui qui indique aux musiciens l’allure à laquelle aller pour exécuter une musique. Mais puisque le beat n’est pas une unité étalon, pour définir une allure précise les musiciens ont nécessairement besoin de définir une équivalence avec une unité étalon. Par convention, on utilisera la minute. Il nous faut alors compter le nombre de beats que notre métronome réalise chaque minute : c’est le BPM.

Le BPM

On dit par exemple qu’une musique à un tempo de 60 BPM ou 60 beats par minutes. Vous l’aurez deviné, un tempo de 60 BPM est égal à une pulsation par seconde.

Ainsi, la régularité de la pulsation garantit l’égalité des beats, égalité garantissant à son tour la régularité d’un certain tempo.

Pour le compositeur, le tempo n’est pas simplement une valeur épinglée au début d’une musique, c’est surtout un outil supplémentaire pour transmettre une certaine émotion, un ressenti particulier. Le tempo contribue ainsi à l’expressivité générale de la composition. C’est pourquoi traditionnellement, le tempo se note à l’aide de termes relatifs au mouvement. Ces termes sont utilisés pour rendre compte de l’allure et des sensations du tempo. De ces termes, il en existe beaucoup. Voici cependant un tableau des termes les plus communs.

La notation du tempo

Sur une partition, la durée d’une note est abstraite par essence et dépend totalement du tempo choisi. Avec le BPM, nous n’avons jusqu’ici défini que la durée d’un beat. Mais quelle valeur de note équivaudrait donc à la durée de ce beat ?

Bien que toutes les figures de notes définissent leur valeur en fonction de celle de la ronde, la figure de note généralement préférée pour définir le tempo, c’est la Noire.

Ainsi, dans une musique où la noire est l’unité, Il nous faut compter le temps qui passe en nombre de noires par minute.

Le tempo s’écrit alors

Ou plus sobrement :

Attention, cette dernière égalité simplifiée est trompeuse. Notez bien que la noire ne vaut pas 60 beats, mais bien 60 beats par minutes. Dans ce cas, on voit bien que notre noire dure 1 seconde entière.

Il est aussi tout à fait possible de préciser textuellement l’allure du morceau. Ici, pour 60 BPM, on choisira de préférence le terme Lento. Certains compositeurs préfèrent même quelques fois n’utiliser que le terme italien pour laisser une plus grande flexibilité à l’interprète, puisque Lento équivaut à vitesse allant de 52 à 68 BPM.

Enfin, notez bien qu’une fois que le tempo est défini, il est valable pour toute la durée de la composition sauf si le compositeur définit un autre tempo plus loin dans la musique.

Equivalences temps – valeurs de note

Nous avons vu que la noire est la figure de note généralement préférée pour définir le tempo. Mais l est tout à fait possible de choisir n’importe quelle autre valeur de note comme référence. Au lieu d’une noire, on peut mettre une croche, une blanche, ou même une ronde pourquoi pas. Cependant, cela changera la manière dont l’oeuvre sera exécutée, divisant ou multipliant la vitesse d’exécution.

Si l’on souhaite malgré tout conserver la vitesse d’exécution originale, il nous faut dans ce cas adapter la valeur des notes sur la partition.

Ressentir et comprendre le tempo

Pour vous rendre compte de la sensation des différents tempos, je vous propose de taper ces quelques termes italiens dans les barres de recherche des sites de streaming et d’écouter les musiques qui vous sont proposées en battant la pulsation du pied.

Demandez-vous alors : pourquoi le compositeur utilise-t-il ce tempo pour cette musique ? Qu’a-t-il voulu véhiculer avec cette allure ? Et qu’est-ce que ça changerait à la composition si on accélèrerait un peu le tempo ? Si on le ralentissait ?

Au-delà de simplement apprendre ce qu’est le tempo, Je pense qu’il est tout aussi important d’apprendre à ressentir ses effets. Car, à n’en pas douter…

“Le plus nécessaire et le plus difficile dans la musique c’est le tempo.”
Mozart, compositeur autrichien du XVIIIe siècle

Conclusion

Avez-vous bien assimilé cette leçon ? Sauriez-vous me dire :

  • Quelle est la différence entre la pulsation, le beat et le tempo ?
  • Qu’est-ce qu’un temps lisse ?
  • Quelle tranche de BPM utiliser pour jouer un tempo allegro ?

Pour aller plus loin, je vous propose de tester vos connaissances avec les exercices mis en place dans l’espace de formation.